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Cher(e) ami(e) de la Santé,
Les narcissiques « grandioses », comme un Donald Trump, vous les voyez arriver : sûrs d’eux et arrogants.
Mais attention !
Il y a une autre catégorie de narcissiques, beaucoup plus subtile : ce sont les « narcissiques vulnérables ».
On ne les repère pas au premier abord. Au contraire, ils peuvent sembler timides et manquer d’assurance.
Et pourtant, ce sont bien des narcissiques, avec de vrais fantasmes de grandeur et ce sentiment caractéristique que tout leur est dû.
Mais leur spécificité, c’est qu’ils souffrent aussi d’une mauvaise image d’eux-mêmes.
Résultat : ils ont à la fois un sentiment de supériorité et d’infériorité.
C’est terriblement douloureux : ils se jugent « uniques », « incompris » (comme des génies méconnus), et en même temps, ils doutent de leur propre valeur, voire de leur propre dignité.
Hypersensible, paranoïaque et colérique
L’autre spécificité du narcissique vulnérable, c’est qu’il est souvent hypersensible.
Il est débordé par les émotions – il oscille entre l’extrême confiance en lui et l’extrême sentiment d’insécurité.
Du coup, il est beaucoup plus vulnérable à la critique que le narcissique grandiose – sauf que cela ne se voit pas forcément :
« Ces personnes se vexent pour un rien mais ne sont pas perçues comme susceptibles car elles ruminent leur colère et leurs rancœurs plutôt que de l’exprimer verbalement »1.
Ils ont tellement peur d’être critiqués qu’ils sont souvent dans l’évitement ou la fuite.
C’est pour ça que les narcissiques vulnérables sont instables : pour protéger leur ego fragile, ils sont capables de « tout plaquer », du jour au lendemain : changer de pays, changer de projet, etc.
Malheureusement, ces narcissiques vulnérables ne se contentent pas toujours de fuir – parfois ils attaquent.
C’est le cas quand ils souffrent, en plus, d’un trouble de la personnalité paranoïaque.
Comme ils ont du mal à se mettre à la place des autres, ils redoutent souvent le pire.
Résultat : ils ne font confiance à personne, ils se méfient de tout le monde et partent du principe que les autres leur en veulent.
Et la conséquence de cette hypersensibilité, c’est parfois la rage, l’agressivité et la rancune.
Voilà encore une spécificité du narcissique vulnérable2 : c’est précisément parce qu’il est vulnérable qu’il peut « exploser » dans une colère noire.
Mettez-vous à sa place : quand il a l’impression d’être critiqué, il se sent attaqué au plus profond de lui-même.
Résultat : il peut se mettre dans une rage « intense », « envahissante » et « mal dirigée »3.
Cette rage vise à se protéger contre le sentiment de honte et d’humiliation : plus les narcissiques sont sensibles à la honte, plus ils vont « exploser » si leurs défauts sont révélés au grand jour.
Et c’est ainsi que les narcissiques vulnérables passent une bonne partie de leur temps dans la rumination, la rancune et le désir d’obtenir vengeance.
Certains encombrent les tribunaux, à coups de procès irrationnels – et comme ils finissent souvent par les perdre, cela accroît encore leur sentiment que « tout le monde leur en veut ».
Évidemment, ce n’est pas agréable si c’est sur vous que cette colère s’abat.
Mais il faut bien comprendre que le narcissique vulnérable n’a jamais demandé à être comme il est.
Il ne demande qu’à être équilibré, bien dans sa tête et son corps.
Mais il est plongé malgré lui dans un effroyable cercle vicieux : comme il prête à autrui les pires intentions, il peut être agressif… ce qui conduit les autres à se défendre, voire contre-attaquer… et donc à se comporter exactement comme il le craignait.
Encore une preuve, se dit-il, qu’il a bien raison de ne faire confiance à personne. Et cela l’enfonce encore dans sa pathologie.
Pourquoi il est plus à plaindre que vous ne le pensez
Le narcissique vulnérable cherche plus que tout à être aimé et admiré… mais il ne peut s’empêcher de rendre ce rêve impossible par son agressivité destructrice.
C’est difficile pour son entourage… mais particulièrement triste pour lui.
Car à l’origine de son problème, il y a toujours une faille, une blessure profonde.
Selon le Dr Laurent Schmitt, son narcissisme est souvent « une manière de surcompenser toute une série de fissures, comme le fait d’avoir été le moins aimé dans une fratrie ou d’avoir dû composer avec un handicap physique »4.
Les narcissiques vulnérables sont minés par la peur : peur d’être « démasqués » pour ce qu’ils sont vraiment, peur d’être rejetés par les autres.
Pour le narcissique grandiose, se sentir supérieur est une jouissance.
Mais pour le narcissique vulnérable, c’est une question de survie.
Rappelez-vous qu’il est « hypersensible », à fleur de peau.
Il sait, plus ou moins inconsciemment, qu’il a d’énormes défauts – il lui arrive même de se juger beaucoup plus sévèrement que les autres.
Mais prendre conscience de ses failles est beaucoup, beaucoup trop douloureux pour lui.
Il n’a pas le choix : il doit tout faire pour préserver une bonne image de lui-même… sinon c’est la torture interne permanente, voire la dépression profonde.
Voilà pourquoi c’est toujours lui la « victime », et qu’il ne peut jamais être en tort.
Il est condamné à ne voir les autres que sous l’angle de la méfiance, de l’envie5 ou de la manipulation.
Et il lui est donc presque impossible de nouer une relation profonde, authentique avec les autres.
Que faire si vous avez un narcissique autour de vous
Au total, il est évidemment très difficile d’avoir une relation normale avec un narcissique.
Mais parfois, nous n’avons pas le choix : ils sont dans notre famille, ou dans notre entourage professionnel.
Dans ce cas, la première chose à faire, c’est de bien comprendre leur fonctionnement.
C’est pourquoi je vous ai écrit cette lettre.
Bien les connaître est le meilleur moyen de ne pas devenir victime de leurs agissements.
Ensuite, la question est de savoir comment les « gérer ».
Dans une chronique Internet, le psychologue Nicolas Chevrier donne toute une série de bons conseils, que je vous invite à lire ici.
Il est important notamment :
- De leur faire des retours factuels et spécifiques (y compris dans les compliments) pour éviter d’alimenter leur ego démesuré ;
- De ne jamais les critiquer en public ;
- et de fixer des limites claires à leur comportement, sans leur accorder de passe-droit.
Mais je voudrais conclure avec ces jolies paroles, certes un brin utopiques, du Dr Laurent Schmitt :
« Le plus important est de ne pas tomber dans le piège de « les remettre à leur place ». Ceci n’aurait d’autre conséquence que de générer une animosité, laquelle sera un obstacle à toute amélioration.
Ce qui manque à une personne narcissique est de l’affection réelle et une véritable acceptation.
Rappelez-vous que l’amour rend tout possible, notamment dans les cas où la maladie résulte de son absence. »
Bonne santé,
Xavier Bazin